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J'attendais à la sortie de Montluçon, l'avenue était large et plutôt silencieuse, baignée par les rayons obliques d'un début de soirée de juillet.

Une mobylette ralentit en me voyant. "Encore un comique qui va me dire qu'il aurait bien voulu me prendre, mais qu'il n'a pas de place", me dis-je.

L'engin arrive à ma hauteur : c'est une mobylette-tuning, repeinte en couleurs électriques, ornée de flammes. Son chauffeur, un quadragénaire chauve et tatoué, ôte un casque supersonique pour m'expliquer, d'une voix énergique et assurée, que j'ai rien compris à l'auto-stop.

"On dirait que t'as honte de ton panneau, là ! Il faut que t'y croies !" Il me le prend des mains, fait un pas sur la chaussée même et le brandit comme un étendard - alors que jusqu'ici, j'attendais sagement sur le trottoir, le bras à moitié déplié vers la droite, pas plus haut que ma taille. Il dit qu'il a des années de pratique derrière lui et que la semaine prochaine il part en stop sur la Côte. Il continue à m'abreuver de conseils et de considérations sur les automobilistes, tout en inscrivant un gigantesque "SVP" au dos de mon carton, sans la moindre destination. "Tu la diras quand la bagnole s'arrêtera, parce que même si on t'amène dix bornes plus loin c'est déjà bon à prendre". Et il mime la situation avec un grand sourire poli, comme s'il parlait à une dame élégante au volant, à travers une vitre baissée.

"Comme ça t'iras beaucoup plus vite, tu verras. Tu brûleras un cierge à Christian, le roi de la route". Il me souhaite bon courage, enfile son casque et repart aussi décidé qu'il était arrivé.

-- SorTidserre - 10 Aug 2005